Marraine de guerre
Cher Hugues,
Je désespère d'avoir de vous nouvelles... Savez vous que l'attente est parfois pire que l'action? Je ne devrai pas dire cela, mais le petit chemin caillouteux qui mène à la boîte aux lettres est devenu mon seul lien avec l'espoir, avec le fluide qui me permet de vaquer aux tâches quotidiennes.
Mon chemin de croix.
Les femmes sont de plus en plus nombreuses à apprendre que leurs hommes se sont lassés de lutter au jour le jour, et qu'ils sont partis, morts pour eux, bien vivants dans le souvenir, pour elles.
Je ne devrai pas vous parler de cela, alors qu'ici tout est calme, et que vous vivez sous les bombes, ou sur leur présage, ce qui doit être encore plus abominable.
Vous aimiez la sonorité de ce mot, "abominable", sa réalité doit être plus charnelle, plus viscérale encore. Je pense à vous, sans transition, en rupture d'équilibre, encore.
Je vous envoie les fleurs du printemps. On dirait que tout est à sa place.
Je vous embrasse,
Bien à vous,
Mina